mercredi 30 novembre 2016

... Émile Friant

Ce peintre s’appelait Émile Friant.

Il était né en 1863 dans la région de Nancy, et le musée des beaux-arts de Nancy lui consacre aujourd’hui une rétrospective jusqu’au 27 février 2017.
Ses plus beaux portraits y sont exposés.



Un peintre oublié...

Qu’est-ce qu’un beau portrait ?

Peut-être l’image d’un visage dont on peut voir, à sa surface, comment elle a été réalisée, les touches du pinceau, les traits du crayon, mais d’où sourd pourtant comme derrière une vitre trouble une présence singulière, une personne, avec ses plaisirs et ses douleurs.

Les peintres qui ont eu cette habileté sont souvent renommés, mais curieusement pas l’auteur des magnifiques visages féminins reproduits sur cette page.
Célébré en son temps il a été vite oublié, balayé par la surenchère des avant-gardismes bigarrés qui se sont succédés depuis plus d’un siècle.








À suivre…

mardi 15 novembre 2016

Améliorons les chefs-d'œuvre (11)

Le lecteur se souvient peut-être de l’aventure du luxueux facsimilé du tableau géant de Véronèse conservé au Louvre, les Noces de Cana. La société espagnole Factum Arte l’avait imprimé et accroché dans le réfectoire du couvent de San Giorgio Maggiore pour le compte d’une association vénitienne, et certainement vendu au prix de l’original si on considère les moyens techniques mis en œuvre et le faste de son inauguration.
Coutumière de ces reconstitutions pharaoniques et habile à émouvoir la sensibilité des autorités ecclésiastiques ou culturelles inconsolées de la disparition d’icônes de leur patrimoine, la société Factum Arte vient de brillamment récidiver, cette fois à Palerme en Sicile.

Caravage, Nativité (détail)
L’évènement fondateur remonte à la nuit du 17 octobre 1969, dans l’oratoire San Lorenzo de Palerme, quand d’anonymes indélicats découpaient grossièrement et emportaient une toile de Michelangelo Merisi dit le Caravage, une grande nativité.

Les bruits les plus effrayants ont couru sur le sort de l’œuvre, jusqu’à celui de sa perte définitive, d’après le témoignage d’un maffieux qui déclarait en 1996 que la toile avait été tellement pliée et abimée par les manipulations que le commanditaire du vol en aurait pleuré et ordonné sa destruction.
Puis durant 45 ans, pour en raviver le souvenir, une photographie aux couleurs fanées remplaça dans son cadre baroque le chef-d’œuvre de Caravage.

Mais la société Factum Arte est arrivée, consolatrice de la veuve et de l’orphelin patrimoniaux. Elle a mis en œuvre son abondant argumentaire technique, ses expertises cabalistiques, ses imprimantes uniques au monde, mobilisé les officiels les plus considérables jusqu’au président de la République italienne en personne, et le tour était joué.
L’oratoire San Lorenzo est depuis le 12 décembre 2015 orné d’une photographie plus belle encore que l’original, que Factum Arte n’hésite pas à baptiser « Re-matérialisation de l’œuvre ». Reconnaissons tout de même qu’où elle se situe, à 4 mètres au dessus du sol derrière son mobilier rococo, on ne distingue pas bien les subtilités du délicat relief imaginé pour simuler les défauts d’une toile et les traces de pinceau du peintre.
Et soyons persuadés que Factum Arte dans ses laboratoires les plus secrets, et à l’aide de technologies pointues, est en train de concocter le facsimilé le plus parfait qu’on puisse imaginer, et qui remplacera définitivement tous les autres, le facsimilé d’un président de la République inaugurant un évènement quelconque avec son cortège d’officiels. D’ailleurs c’était peut-être le cas à Palerme.

Afin de ne pas briser le charme de cette émouvante histoire de résurrection nous éviterons de nous demander si l’exorbitante fabrication d’un facsimilé (avec des techniques ultramodernes) est aujourd'hui le meilleur moyen de préserver le souvenir d’une œuvre disparue.

dimanche 6 novembre 2016

Monuments singuliers (4)



Le monument aux morts pacifiste de Gentioux

Un jeune enfant en blouse d’écolier et chaussé de sabots dresse un poing serré vers une stèle où sont inscrits les noms des morts du village lors de la guerre de 1914-1918, au dessus d’une épigraphe qui s’exclame « Maudite soit la guerre ».
C’est le monument érigé en 1922 par la commune de Gentioux dans le département de la Creuse.

La protestation peut sembler modeste, la sculpture grossière et le message simpliste, mais s’il faut ériger un monument aux morts, quel est le meilleur exemple à montrer aux enfants d’un village ? Un écolier indigné et décidé devant l’inventaire des disparus, ou, comme dans le village de Murat-le-Quaire à 60 kilomètres vers l’est, les symboles habituels glorifiant les faits d’armes, les obus, et la croix de guerre qui récompensa la bonne conduite de ces hommes morts scrupuleusement comme on leur demandait.

L'ouvrage n'a jamais reçu l'onction préfectorale. En 1990 il était inscrit (mais pas classé) dans la liste des monuments historiques. Tous les ans le 11 novembre s'y retrouvent plusieurs centaines de sympathiques libres-penseurs antimilitaristes, anticléricaux, voire anarchistes.